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Première et quatrième de couverture

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  Photo prise par l’auteur en 2012, à Pairi Daiza, le Jardin des Mondes (Cambron-Casteau, Belgique) On ne choisit pas sa fin lorsqu’on est déchiqueté sous une rame de métro (1), c’est sûr. Lardé par un couteau voyageur (2), pas davantage ! Pas plus quand un poing vengeur nous achève (5) ou si notre chair se retrouve cuite à point dans une casserole à pression (8). On ne décide rien, ni d’écoper d’un coup de feu jaloux (9), ni de pourrir sous la terre remuée d’un jardin (7). Mais c’est tout aussi mortel de se faire délester de sa tirelire (6), de chuter sous l’emprise d’une obsession sexuelle (3) ou, plus simplement, de devenir le jouet de comédiens peu scrupuleux (4).

Introduction

  Presque toujours, une histoire se termine différemment qu’elle avait commencé, vous devez en savoir quelque chose ! C’est toute la gymnastique des nouvelles, ces romans en short d’une dizaine de pages. On ne sait rien de ce qu’il s’est passé auparavant et pas grand-chose de ce qu’il se passera ensuite. Même pas l’auteur ! Salto difficile de l’instantané, composition acrobatique dont la chute est incertaine, exercice dynamique d’enchainements, c’est une exécution qui ne supporte pas le moindre travers, la moindre faute. Je m’y suis risqué, dans le style noir, au risque de me ramasser : vous êtes un jury implacable ! « Finit en queue de poison » est un vivier de personnages, des perdants pour la plupart, dont le quotidien n’est finalement pas si éloigné du nôtre, cette vie de tous les jours où parfois tout bascule sur un détail, un moment, une rencontre, un inéluctable. C’est de cela que j’aimerais que les lecteurs se souviennent en découvrant ces brèves parties d’existence : ...
  1 - Quidam qui ? [via Bernie Brugman] Le quidam ponctuait son soliloque de petits gestes boudinés qu’il semblait ne jamais vouloir achever. Nous traversions à pas lents la place du Luxembourg, comme deux collègues qui se rendent au bureau, mais lui me bassinait de sa biographie et n’avait pas l’air pressé. Dans la foule agitée que vomissait la gare, notre duo pouvait paraître suspect, quoique, entre les rangs des travailleurs qui nous bousculaient, personne ne portait attention à nous. Par contre, moi qui étais en manque de caféine, j’avais plutôt hâte que notre entretien fût concluant. « Je vous offre une tasse de café, Monsieur Brugman ? », s’interrompit-il subitement. Ma réponse négative sonna bizarrement tandis que je reluquais le bistrot réconfortant où il m’invitait. Pas question de m’y attarder avec lui ! D’ailleurs, sans cette soi-disant colique qui scotchait Saïd aux chiottes, je n’aurais pas dû être là. D’ailleurs, nous ne ferions ...
  2 - Mouchez le potiron ! par Bernard Guilmot [via Lewis Carol] « J'ai beaucoup aimé cette nouvelle, une écriture vive, l'ambiance étrange, glauque, est superbement décrite, les images se superposaient à l'écrit. Je ne suis pas une critique avertie, mais la lecture est mon pain quotidien. J'en lirai volontiers d'autres… ». CHANTAL MORAX Comme d’habitude, la perspective de rencontrer l’assistant social qui se préoccupait un peu trop de mon cas me fichait une sacrée paranoïa durant toute la quinzaine qui précédait notre entretien. Nos rendez-vous en tête à tête étaient rares, quoique programmés tout au long de l’année, car une commission d’êtres invisibles se devait de réviser les dossiers personnels plus ou moins tous les six mois. Comme quiconque, du reste, qui s’est hissé un peu par hasard à l’échelon social entre celui du chômeur et du carton du clochard. Pourtant, c’était un homme bien plus intéressé par mes éventuels problèmes que mandaté pour ...
  3 - Un cœur  au fond du bois par Bernard Guilmot [via Anonyme] Une ou deux fois par semaine, je descendais en ville pour y trouver ce qu’on n’a pas chez soi, comme tout villageois, je pense. Rien de bien original, ma foi, comme arpenter les rues en quête de rien, m’alanguir à la terrasse d’un bistro pour reluquer les jolies filles de ville ou me ravitailler en cigares gros de dix-sept centimètres. Oui, ma solitude a ses rites et côtoyer tout ce monde en si peu de temps ne me rendait pas plus sociable pour autant, Dieu m’en préserve ! Exception faite pour Kébir, ce vieux renard de brocanteur avec qui je taillais toujours une bavette avant de retourner au pays. Auparavant, j’avais comme d’habitude mis sens dessus dessous son repaire, si bien que ce dernier paraissait plus rangé qu’à mon arrivée. J’apprécie beaucoup les antiquités et, dans son désordre coutumier, j’en dénichais toujours l’une ou l’autre que j’acquérais à peu de frais. Kébir avait plus ou mo...